Surenchères compétitives

Surenchères compétitives

Jean-René Vernes 

Vous aviez envie de jouer à un palier donné dans votre atout. Et voilà que l’enquiquineur de droite ou de gauche surenchérit…

Faut-il alors baisser les bras, céder au chantage en surenchérissant soi-même ou carrément sortir le bâton pour punir l’insolent ?

De nombreux critères entrent en ligne de compte : la vulnérabilité, bien sûr, le type d’épreuve (match par quatre ou tournoi par paires ?), votre tempérament et celui de l’adversaire… Point de vérité absolue en ce domaine, mais il importe tout de même de suivre quelques lignes directrices si vous ne voulez pas vous tromper trop souvent.

Imaginez l’enchère que vous auriez faite dans chacune de ces situations avant de lire mon avis… sans oublier d’indiquer éventuellement plusieurs choix différents selon la vulnérabilité et le type d’épreuve.

Ouest
  • RV654
  • R95
  • A2
  • D103
ONES
1♠22♠3
?
Passe : si vous surenchérissez avec cette main-là, c’est que vous ne passez jamais dans cette situation ! Sur le long terme, vous ne pouvez pas vous en sortir. Votre main régulière aux honneurs éparpillés est purement défensive, c’est-à-dire bien plus efficace en flanc qu’en face du mort. Que vous soyez par paires, par quatre, vert contre vert (la situation idéale pour surenchérir dans un combat de partielle) ou bleu contre jaune, surenchérir à 3♠ est juste une grosse bêtise.
Ouest
  • RV9654
  • 95
  • A2
  • R103
ONES
1♠22♠3
?
3♠ : vous avez ouvert à 11 points, mais le nombre de points n’est pas un critère de décision dans le chapitre qui nous occupe aujourd’hui. Vous possédez un fit neuvième et aucune raison particulière de ne pas faire confiance aux calculs statistiques de Jean-René Vernes, le père de la loi des levées totales et de la sécurité distributionnelle. Le plus souvent (pas toujours mais suffisamment souvent pour être bénéficiaire sur le long terme), vous allez soit gagner 3♠, soit chuter d’une contre 3 qui gagne. Bien sûr, dans ce cas, vous risquez de perdre 200 si vous êtes contré et vulnérable, mais oubliez ce cas. Fittés, vos adversaires auront beaucoup plus tendance à surenchérir à 4 qu’à vous contrer.
Ouest
  • RV965
  • 5
  • A42
  • RV103
ONES
1♠22♠3
?
3♠ : votre fit n’est que huitième, mais le singleton à Cœur compense. De plus, la grande majorité de vos points est située dans vos longues, ce qui constitue un élément très positif en face du mort (ils génèrent des levées de longueur) mais très négatif en flanc (ils se font couper plus vite).
Ouest
  • A9865
  • RDV10
  • A2
  • 83
ONES
1♠22♠3
?
Passe : évidemment, vous aimeriez contrer puisqu’il est évident que 3 chute, probablement de plusieurs levées. Le problème, c’est que, dans cette situation, le Contre n’est pas punitif : il s’agit d’une enchère d’essai pour proposer la manche à votre partenaire. Or, vos chances de gagner 4♠ sont à peu près nulles. Contentez-vous donc de marquer dans votre colonne en laissant Nord chuter 3. Mais rassurez-vous, contre des adversaires sains d’esprit, vous ne rencontrerez pas souvent cette situation.
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Ouest
  • RV54
  • D2
  • AR54
  • V74
ONES
1-1♠-
2♠--3♣
?
Passe : où est la plus-value distributionnelle qui vous permettrait de surenchérir au palier de 3 avec un fit huitième ? Nulle part. Alors ne surenchérissez pas. Avec 14 points, vous êtes maximum de votre soutien à 2♠ ? C’est vrai. Et si ça augmente vos chances de battre 3♣, ça ne vous place certainement pas en sécurité distributionnelle au palier de 3. Ca vous agace quand vos adversaires réveillent ? Vous avez l’impression qu’on vous a volé votre contrat ? Perdez vite cette fâcheuse habitude si vous voulez faire des progrès. Même par paires, ce serait très mal joué de surenchérir. Laissez la parole à votre partenaire et faites confiance à son jugement.
Ouest
  • RD54
  • 82
  • ARV54
  • 74
ONES
1-1♠-
2♠--3♣
?
3♠ : pas de singleton et seulement huit atouts, mais bien peu de levées de défense et tous les honneurs dans les longues. Sauf peut-être rouge contre rouge (la pire des situations pour surenchérir dans un combat de partielles) et en match par quatre, surenchérissez.
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Ouest
  • A954
  • 2
  • A854
  • RD109
ONES
1-1♠-
2♠--3♣
?
Miam-miam, vous avez Contré ? Certes, 3♣ chute très probablement… mais 3 ? Votre partenaire, qui a passé sur 2♠, n’a pas souvent cinq cartes à Pique (avec lesquelles il fait le plus souvent soit un effort de manche, soit une surenchère “préventive” à 3♠ pour éviter un réveil). Du coup, s’il n’a que quatre Piques, il n’a pas quatre Cœurs et vos adversaires sont fittés neuvièmes dans la couleur. Si vous passez sur 3♣, vous avez une bonne chance que ce soit le contrat final. Si vous Contrez méchamment (oui, il s’agit bien d’un Contre punitif puisque votre camp a trouvé son fit et a décidé de s’arrêter à 2♠ : à quoi diable pourrait bien servir un Contre d’appel ?), nul doute que Nord débarquera avec ses probables six cartes à Cœur (Sud n’en a pas quatre quand il réveille par 3♣). Et alors, le beau carrosse se sera changé en citrouille !
Ouest
  • R9542
  • D4
  • D85
  • 754
ONES
1-
1♠-2♠-
-3♣--
?
3♠ : au nom de votre médiocre main régulière, vous n’avez pas voulu barrer à 3♠ au tour précédent pour inhiber un réveil adverse, en espérant jouer 2♠ en paix. Bien entendu, l’adversaire ne l’a pas entendu de cette oreille. Vous voilà contraint de surenchérir à 3♠, fit neuvième oblige.

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Professeur agréé par la F.F.B, Marc Kerlero enseigne le bridge depuis 1980. Il est l'auteur de 15 ouvrages, dont plusieurs best-sellers et a été rédacteur en chef d'Objectif 13 puis de Bridgerama. Il a collaboré aussi à Jouer Bridge. Il a été champion d'Europe junior en 1984, vice-champion de France de division nationale I en 2004, champion de France de division nationale II par quatre en 2014 et vainqueur de la Coupe de France en 2019.