L’évaluation des mains

L’évaluation des mains

Au début du bridge régnait la Ténèbre…
Chacun enchérissait plus ou moins au hasard, sans idée très précise sur la force exacte de son jeu.
Comment savoir, par exemple, le nombre de levées que produira un jeu banal tel que celui-ci :

Ouest
  • RV54
  • A63
  • D2
  • R1052

C’est parfaitement impossible…
Un jour, enfin, Saint Milton Work inventa une méthode d’évaluation simple, le compte des points d’Honneurs, qui allait révolutionner le noble jeu et lui permettre de conquérir le monde.
4 points pour un As, 3 pour un Roi… géniale intuition !

En effet, bien plus tard, des mathématiciens désœuvrés décidèrent de bourrer leur ordinateur de donnes de bridge, pour essayer d’évaluer le potentiel réel moyen en levées des quatre plus grosses cartes. Voilà ce qu’il en sortit :

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As : 1,70 levée

Roi : 1,25 levée

Dame : 0,75 levée

Valet : 0,35 levée.

Ne soyez pas surpris de voir les As et les Rois réaliser plus d’une levée.

Cela tient principalement à leur pouvoir de «protection» des autres honneurs : un Roi tout seul fait une levée une fois sur deux (environ). Quand l’As est dans le même camp, le Roi fait une levée à tous les coups. On peut donc mettre cette demi-levée gagnée au bénéfice de l’As.

Si l’on prend 0,4 point comme valeur de base d’une levée, vous constatez à quel point Milton Work était proche de la réalité : simplement, le compte des points H dévalue un peu les As et les Rois, tout en surévaluant les Dames et les Valets. Il importe donc d’être optimiste lorsque votre jeu comporte beaucoup de «têtes» et pessimiste si vous possédez beaucoup d’honneurs inférieurs (4 As «blancs», par exemple, valent bien 17 points H).
Néanmoins, des études plus fines, associées à l’expérience des plus grands champions, ont montré que ces chiffres étaient d’autant plus justes que les distributions étaient régulières.

Dès qu’apparaissent belles couleurs longues, singletons, chicanes et gros bicolores, ce système simple d’évaluation rend de moins en moins bien compte de la valeur exacte des mains, d’autant plus que ce qui importe réellement, ce n’est pas la force de la main de Sud, mais la force de la main de Sud associée à la main de Nord.

Bien sûr, il existe les points de Distribution, mais ceux-ci ne sont pas toujours non plus très fiables, puisqu’ils évaluent deux doubletons comme un singleton (ce qui est à la limite du non sens) et une main 4441 comme une main 5431, souvent bien plus forte.

Je vous propose donc un petit tour d’horizon des mille et une recettes qui, si elles ne vous valent pas à coup sûr les honneurs des gazettes (comme disait Brassens), vous permettront tout de même, je l’espère, d’affiner votre «jugement».

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Professeur agréé par la F.F.B, Marc Kerlero enseigne le bridge depuis 1980. Il est l'auteur de 15 ouvrages, dont plusieurs best-sellers et a été rédacteur en chef d'Objectif 13 puis de Bridgerama. Il a collaboré aussi à Jouer Bridge. Il a été champion d'Europe junior en 1984, vice-champion de France de division nationale I en 2004, champion de France de division nationale II par quatre en 2014 et vainqueur de la Coupe de France en 2019.