La “Picol” en DN/4

La Picol en DN/4

La DN/4 est ma compétition préférée au bridge. J’adore l’esprit d’équipe que cela procure et la possibilité de faire les points aux côtés de mes coéquipiers. L’an dernier, j’ai eu la chance d’accéder à la plus haute division française, la DN1 (désormais appelée Top 16), mais suite à un remaniement d’équipe, nous nous retrouvons relégués en DN2. Ce n’est pas dramatique : nous allons tout mettre en œuvre pour retrouver notre place en DN1.

La compétition se déroule sur trois week-ends avec deux poules de 16 équipes chacune. Pour monter en DN1, il faudra terminer dans les deux premiers de notre poule. Si nous finissons troisièmes, nous aurons droit à un barrage, comme au football.

Voici la composition de mon équipe pour cette année : Nathalie Frey (ma partenaire de mixte), Jacques Bannaire (mon partenaire de paire), Nicolas Roussel avec Guy Laffineur (déjà vainqueur de la DN1/4), et Colin Deheeger (mon partenaire de compétition). Je suis ravi de pouvoir jouer cette DN/4 avec Colin cette année. Nous sommes très motivés et espérons que nos entraînements porteront leurs fruits dès le premier week-end. Chaque week-end, nous disputerons 5 matchs de 18 donnes.

Bonne ou mauvaise nouvelle selon le point de vue : il n’y aura pas de confrontation contre Marc Kerlero, qui évoluera dans l’autre poule.

Je vais vous raconter des donnes de mon week-end (des bonnes comme des mauvaises).

Les compétitives à haut palier

Est
  • 10
  • V97532
  • 8
  • R7654
ONES
?

Vous êtes à l’ouverture en première position, vulnérabilité égale (vert contre vert). Quelle enchère choisissez-vous ?

Je détiens une main distribuée 6-5, mais la qualité des honneurs pose problème et la vulnérabilité n’est pas favorable (nous ne sommes pas vert contre rouge). Les ouvertures de 2 ou 3 ne me conviennent pas, je préfère passer dans un premier temps pour annoncer ultérieurement mes Cœurs ou mon bicolore selon l’évolution des enchères.

Mon partenaire ouvre de 1 en troisième position (une bénédiction !). L’adversaire contre, je décide d’enchérir 3♠ splinter. Colin conclut à 4 et mon adversaire décide d’annoncer 4♠.

Pas question de laisser jouer l’adversaire au palier de 4♠ avec mon 6-5, je décide de surenchérir à 5. Je me fais contrer.

ONES
- -
1 X 3♠
4 4♠ ?
ARDV76
AV64
A32
8542
ARD6
1093
DV
10
V97532
8
R7654
93
1084
RD752
1098

Une ouverture logique de 1 en troisième position avec ARD dans la couleur, même quatrième, pour indiquer l’entame au partenaire si les adversaires jouent le contrat. Nous avons chuté de une au contrat de 5, mais nous remarquons que les adversaires réussissent 6♠, contrat difficile à trouver !

Une donne de jeu de la carte

642
AD95
DV10
D83
RV3
R63
R865
RV2
10
ONES
-
- - 1 -
1 - 1SA -
2SA - 3SA Fin

Vous jouez 3SA sur l’entame du 10 de Cœur. Vous devez prendre de l’As pour préserver vos communications avec le mort, puis vous jouez deux fois Carreau. Les adversaires choisissent de ne pas prendre la levée.

Comment poursuivez-vous ?

Je décide d’abandonner mes Carreaux et d’essayer d’affranchir mes Trèfles (contretemps). Je joue Trèfle vers le Valet, Sud prend de l’As et rejoue Cœur. Je prends de mon Roi en main et rejoue Carreau pour faire tomber l’As de Carreau. L’adversaire prend en Nord et contre-attaque de la Dame de Pique, je couvre de mon Roi pour l’As de Sud.

La défense réalisera encore une levée avec le Valet de Cœur quatrième, mais cela me suffit pour réussir ce contrat vulnérable.

D109
V742
A74
1064
642
AD95
DV10
D83
RV3
R63
R865
RV2
A875
108
932
A975

Si l’adversaire avait pris directement de son As de Carreau et avait rejoué Pique, la suite aurait été : le Valet chez moi, l’As en Sud, puis Pique pour mon Roi. Il aurait alors suffi de faire tomber l’As de Trèfle pour réussir le contrat car les Piques sont heureusement bloqués (D109) !

La seule entame qui fait chuter le contrat est l’entame dans l’As quatrième à Pique.

Une très belle enchère chez Nathalie

Ouest
  • 6
  • ADV3
  • AV98642
  • V
ONES
- 1♠
2 3 - 4♠
?

Vous êtes vert contre vert, une action ?

Nathalie décide d’enchérir car elle possède une forte distribution. Elle peut gagner un contrat, mais aussi avoir une défense efficace contre le contrat adverse ou inciter les adversaires à surenchérir. Ne souhaitant pas cacher ses Cœurs, elle annonce 4SA pour indiquer un bicolore avec les Carreaux : forcément au moins six cartes à Carreau et au moins quatre cartes à Cœur ou à Trèfle.

Pourquoi au moins quatre cartes dans la deuxième couleur ? Sinon Nathalie aurait effectué un bicolore sur l’ouverture de 1♠.

Sur 4SA, son partenaire décide d’annoncer 5 (passe ou corrige). Nathalie dit 5 pour montrer 6-4, et le contrat final devient 5X.

AR73
7
R103
106432
6
ADV3
AV98642
V
954
R109864
7
987
DV1082
52
D5
ARD5

Finalement, 5 gagne (une perdante à Trèfle et à Pique). Il aurait fallu que les adversaires défendent à 5♠ pour une de chute seulement.

À notre table, j’ai joué le contrat de 4♠. Double manche et 14 IMPs bien mérités pour Nathalie.

Une catastrophe toujours en compétitive

Est
  • AD102
  • A96
  • D85
  • 1054
ONES
1♣ 1 X 3
4♠ 5 ?

Votre partenaire ouvre de 1, l’adversaire annonce 1, vous dites contre cachalot qui montre au moins quatre Piques. L’adversaire saute à 3, votre partenaire (moi) dit 4♠ et l’adversaire dit 5 en étant rouge contre vert.

Quelle est votre décision ?

Colin à une décision difficile, son raisonnement fut le suivant :

“Quand l’adversaire redit 5 en étant vulnérable, c’est qu’il souhaite le gagner. Dans ma main, le contrat peut chuter, mais parfois je peux aussi réussir 5♠. Je décide donc de surenchérir à 5♠.”

L’adversaire qui avait sauté à 3 nous contre, et je vais vous montrer les quatre jeux.

AD102
A96
D85
1054
R8542
AR932
V76
RV643
DV103
764
8
9875
7
V10
ARD932

5♠ est une catastrophe : je fais -4 (800) alors que 5 chuterait d’une seule levée. Mauvaise décision en enchères compétitives à haut palier. Avec du recul, il ne fallait peut-être pas dire 5♠ à cause de la mauvaise répartition très probable des Piques et du fait que nous ne possédions que huit atouts.

Pierre Bedouet est un jeune bridgeur français né en 2001, originaire d'Anjou, qui a transformé sa passion en métier en devenant enseignant au Bridge Club de Nantes. Son palmarès compte deux titres de champion du monde dans la catégorie des moins de 31 ans, ainsi qu’un titre de vice-champion d’Europe. Il fait désormais partie du groupe France Open. Passionné par tous les aspects du bridge, Pierre aime particulièrement transmettre ses connaissances et échanger autour de ce jeu qu’il affectionne, que ce soit dans son rôle d’enseignant ou lors des compétitions.