Interventions bicolores

Les interventions bicolores

Muni d’une main bicolore (au moins 5-5) derrière une ouverture adverse, trois possibilités vous sont offertes :

1) Nommer votre bicolore,

2) Intervenir dans l’une des deux couleurs (la plus longue ou la plus chère à égalité de longueur),

3) Passer, au moins dans un premier temps.

Pour bien manier ces véritables bombes à retardement que sont les interventions bicolores, il est important de comparer leurs mérites avec ceux des deux autres options :

Les AVANTAGES

Ils sont assez clairs :

  • Permettre la découverte immédiate d’un fit dans l’une ou l’autre des deux couleurs, et aussi des doubles fits dont vous connaissez l’importance (en gros, deux fits neuvièmes valent un fit onzième et vous placent en sécurité distributionnelle au palier de 5, surtout si le camp possède les gros honneurs de ses longues et pas de ses courtes).
Ouest
  • 4
  • 43
  • RDV108
  • ADV97
Est
  • 6543
  • 6
  • 654
  • R10432
ONES
1
?4?

Si Ouest est intervenu à 2, Est, vulnérable, passera sur 4 et Ouest n’aura pas les moyens de surenchérir tout seul au niveau de 5.

En revanche, sur une intervention à 2SA, une défense à 5♣ est totalement lumineuse en Est avec cinq atouts et le singleton dans la couleur adverse, pour une de chute contre une manche adverse absolument tabulaire.

Ouest
  • ADV765
  • 52
  • 4
  • 7643
ONES
12SA
?

On a bien sûr envie de nommer les Piques mais, à moins d’avoir convenu du contraire au préalable avec le partenaire et trouvé une solution de remplacement pour les jeux forts (là encore, suivez ce lien), l’enchère de 3♠ est forcing de manche ! Passer dans un premier temps avec dans l’idée de nommer les Piques ensuite n’est guère satisfaisant : que ferons-nous si la parole nous revient au niveau de 5 ? En revanche, sur une intervention simple à 2, ce jeu se traduit parfaitement bien par un JUMP non forcing à 3♠.

Les INCONVENIENTS
  • Les interventions bicolores sont extrêmement dangereuses !

En effet, elles imposent au partenaire de choisir, généralement au niveau de 3 (soit neuf levées), entre deux couleurs qui exercent peut-être sur lui l’attrait que peuvent susciter la peste et le choléra.

Ouest
  • RV7654
  • D543
  • 43
  • 2
ONES
12SA-
?

2SA : ♣-
Personne vulnérable

Ouest
  • RV7654
  • D543
  • 43
  • 2
ONES
12SA-
?

2SA : ♣-
Personne vulnérable

Berk…

De plus, si l’on tombe mal, on se fait contrer beaucoup plus facilement qu’après une intervention à la couleur :

ONES
12X
ONES
12SAX

Dans la séquence de gauche, le contre de Sud est Spoutnik et, pour nous contrer punitif, il doit avoir recours au «contre muet» (passer en espérant que l’ouvreur réveille par contre), toujours délicat à manœuvrer. De plus, au niveau de 2, il décidera souvent d’essayer un contrat en attaque, a priori plus rémunérateur.

En revanche, à droite, le contre de Sud montre simplement que Nord-Sud sont nettement majoritaires en points, et, à partir de là, les deux joueurs pourront placer un contre punitif, d’autant plus facilement que l’on est ici un palier plus haut.

  • Encore plus gravement, bien que l’on y pense moins, les interventions bicolores sont catastrophiques si l’on ne finit pas par jouer le coup, car le déclarant peut manœuvrer son contrat «à quatre jeux» et opérer ainsi quelques spectaculaires cambriolages…
R54
53
AV76
A954
AD82
A8
R10932
72

Contrat : 3SA.

Entame : Roi de Cœur.

Si Ouest n’a jamais parlé, ou est intervenu à 1, vous n’avez aucune raison de ne pas jouer les Carreaux suivant les probabilités : vous tirez en tête, et bien sûr, la Dame est troisième… deux de chute.

Maintenant, si Ouest est intervenu à 2SA sur votre ouverture de 1 (pour décrire un bicolore sans Pique, soit Cœur-Trèfle, ici), c’est tout à fait différent. Avec seulement trois cartes chez lui entre les Piques et les Carreaux, les probabilités sont maintenant nettement en faveur de l’impasse contre Est. De plus, rien ne vous empêche de donner d’abord deux tours de Pique. Quand Ouest fournit, la courte à Carreau est maintenant connue chez lui avec certitude et vous capturez sans mal la Dame de Carreau troisième d’Est. Votre contrat est déjà assuré, mais, pour faire bonne mesure, vous vous octroyez même une onzième levée en fin de coup, puisque les deux Piques d’Ouest étaient le 9 et le 10. Comme il avait exactement un Carreau, l’impasse au Valet contre Est est évidente : 660 dans la bonne colonne et, en tournoi par paires, vos adversaires ont déjà l’avant de la bicyclette…

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Professeur agréé par la F.F.B, Marc Kerlero enseigne le bridge depuis 1980. Il est l'auteur de 15 ouvrages, dont plusieurs best-sellers et a été rédacteur en chef d'Objectif 13 puis de Bridgerama. Il a collaboré aussi à Jouer Bridge. Il a été champion d'Europe junior en 1984, vice-champion de France de division nationale I en 2004, champion de France de division nationale II par quatre en 2014 et vainqueur de la Coupe de France en 2019.