Quatre mains – 45 – VIP

Quatre mains, une séquence – 45

Pour chaque séquence d’enchères, indiquez laquelle (ou lesquelles) des quatre mains de Sud peut correspondre.

ONES
1-1♠
-2♣-2♠

main n° 1

Sud
  • DV742
  • A10874
  • 2
  • 63

main n° 2

Sud
  • RD10987
  • A74
  • 6
  • 642

main n° 3

Sud
  • RD7432
  • A74
  • 6
  • 642

main n° 4

Sud
  • RD742
  • 874
  • 32
  • A63

Que signifie exactement l’enchère de 2♠ dans cette situation ?
On peut la traduire ainsi : “je suis faible (maximum 10 H) et je sais que le risque que tu sois très court à Pique est important puisque tu as nommé un bicolore et que les adversaires ne sont pas intervenus à Cœur, surtout de nos jours où l’on préfère souvent la redemande à 1SA avec les 5422. Néanmoins, je pense que Pique est notre meilleur (ou notre moins mauvais) atout”.

Exit donc la main 4, avec laquelle il faut faire une préférence à 2 pour assurer le minimum vital de 7 atouts. Répéter les Piques serait ici une grosse erreur. Passer aussi, pour deux raisons : 1) une manche est encore possible, vue l’ambiguïté de la redemande à 2♣ et 2) on est moins mal en 5-2 qu’en 4-3.
La 2 est trop belle pour 2♠ : il faut jumper à 3♠, enchère encourageante mais non forcing et garantissant une couleur solide, étant donné le risque important de misfit.
Avec la 3, il faut se contenter de 2♠ car bien que de même force et distribution que la 2, elle supporte beaucoup moins bien le probable singleton à Pique de l’ouvreur. S’il n’est pas trop court à Pique et pas trop minimum, il devra se fendre d’un soutien de politesse à 3♠.
Passons maintenant à la 1 : la situation est cauchemardesque. On n’a pas la moindre envie de jouer 2♣ en 4-2 ou 2 en 5-1 et comme il est rigoureusement exclu de dire 2 (4e couleur artificielle forcing quasiment forcing de manche), le “moins pire” à ce stade (pardonnez-moi cette expression qui n’est pas française bien que souvent employée) est sans doute de répéter les Piques en priant. Le plus agaçant est que notre meilleur atout est très probablement à Cœur ! Bien entendu, vous auriez résolu le problème en adoptant une convention que j’adore consistant à répondre 2 sur 1 (ou 2♣ sur 1♣) pour montrer au moins 5 Piques et 4 Cœurs dans une main d’environ 8-10 H (un peu moins avec un bicolore de 10 cartes). Suivez ce lien.

ONES
1♣-1♠
-2-2♠

main n° 1

Sud
  • V8742
  • R54
  • D74
  • 42

main n° 2

Sud
  • V8742
  • R54
  • D4
  • 842

main n° 3

Sud
  • RD742
  • A87
  • DV4
  • R2

main n° 4

Sud
  • V1087652
  • A42
  • 84
  • 6

Sur un bicolore cher de l’ouvreur (17 H et +), on lit souvent que la répétition simple du répondant ne promet pas mieux que 5 cartes (ce qui est vrai) mais aussi qu’elle est systématique (ou quasi-systématique) dès qu’on a 5 cartes dans la couleur… et là, je suis beaucoup moins d’accord.
Avec la 3, par exemple, je ne vois vraiment pas pourquoi on ne pourrait pas dire 2 : si l’ouvreur a 3 cartes à Pique, il soutiendra à retardement et, comme il sera alors singleton ou chicane à Cœur, il n’aura pas de tentation de nommer en priorité un arrêt à Cœur.
Avec la 4, 2♠ est certes le carton le plus près du pouce, mais c’est une erreur : il faut employer le 2SA modérateur. Si l’ouvreur est minimum, il dira 3♣ et notre 3♠ ultérieur sera alors NON forcing, contrairement à 2♠ suivi de 3♠ qui est FORCING.
Avec la 2, il faut également dire 2SA modérateur, avec dans l’idée de passer sur 3♣. Si vous dites 2♠ et que l’ouvreur dit 2SA, vous devrez passer car 3♣ sera FORCING (là encore) alors qu’il est clair que 3♣ (en 5-3 ou en 6-3) sera un contrat plus sain que 2SA.
En revanche, avec la 1, 2♠ est un moindre mal : on passera sur 2SA (mini, arrêt ), 3♣ (mini, 6 cartes ou pas d’arrêt à )… et aussi sur 3♠ qui décrit une main minimum avec DEUX cartes à Pique (presque personne ne le sait mais c’est pourtant comme ça).

En résumé, je vous conseille de considérer que 2♠ promet presque toujours 6 cartes, sauf en cas de main très faible inadaptée au 2SA modérateur (notre 1). C’est d’ailleurs beaucoup plus cohérent avec le fait que le soutien à 3♠ de l’ouvreur se fasse avec seulement 2 atouts. Avec 3, l’ouvreur dit 4♠ s’il est mini et 4 (Splinter) s’il est maxi.

ONES
1♣-1
-2SA-3

main n° 1

Sud
  • 842
  • V97654
  • 8
  • R74

main n° 2

Sud
  • AV7
  • R97542
  • AD
  • 62

main n° 3

Sud
  • 87
  • 987652
  • AR4
  • 63

main n° 4

Sud
  • A87
  • RDV96
  • 874
  • 63

Eliminons rapidement la 4, qui justifie de faire un relais artificiel (à 3 ou à 3♣, selon vos conventions).
La répétition à 3 promet donc 6 cartes et elle est forcing, d’après le bon principe suivant et qui ne souffre AUCUNE exception : sur une redemande forte de l’ouvreur – qu’elle soit elle-même forcing ou pas – TOUTES les enchères du répondant en dessous de la manche sont forcing. Or, l’ouvreur ayant promis au moins 2 cartes à Cœur par sa redemande à Sans-Atout (description du moussaillon d’une main régulière 18-19), la présence d’un fit au moins 8e dans la ligne est actée quand le répondant en a 6. Dès lors, il faut conclure à 4 s’il n’y pas d’ambitions supérieures et 3 montre logiquement des velléités de chelem.
Notre gagnante est donc la 2. Avec la 3… et la 1, il faut conclure à 4 sans consulter l’ouvreur. Ne pensez même pas une seconde à jouer 3SA avec la 3 : plus les Cœurs sont moches, plus ils seront difficiles à affranchir à Sans-Atout alors qu’ils feront forcément des levées si ce sont des atouts.
Bien entendu, on aimerait pouvoir s’arrêter à 3 avec la 1. C’est possible si on adopte la convention du “check-back Texas” exposée sur ce site : suivez ce lien.

ONES
1♣1♠
-2♣-2♠

main n° 1

Sud
  • D8743
  • A2
  • V43
  • AD2

main n° 2

Sud
  • RV874
  • A4
  • D1042
  • 62

main n° 3

Sud
  • RD874
  • 4
  • AD42
  • 762

main n° 4

Sud
  • R108742
  • A43
  • 4
  • A96

Tiens, il y avait un moment que je ne vous avais pas parlé de ce cue-bid particulier, qui est un de mes chevaux de bataille préféré.
D’après le SEF, il est bivalent : soit le fit à Cœur et 11 DH et +, soit une main forte (12/13 H et + sans couleur 5e ni arrêt à Trèfle).
Je DETESTE cette option car je DETESTE l’ambiguïté sur l’existence d’un fit majeur, en particulier en enchères à 4.
Prenons la main 2, par exemple : si le cue-bid promet le fit dans 100 % des cas, il faut freiner à 2♠ pour montrer une intervention faible et demander au partenaire de passer s’il est dans la zone 11-12 DH, quelles que soient ses cartes. Si le cue-bid n’est pas toujours fitté, on est obligé de dire 2 pour explorer l’éventuelle meilleure manche, avec le risque de le voir s’envoler s’il a un support à Carreau, sans oublier qu’on décrit ainsi la main du futur déclarant au seul bénéfice des adversaires, qu’on aide fortement pour l’entame et le reste du flanc. En revanche, nommer les Carreaux est habile avec la 3 : elle n’est pas très forte, mais si le partenaire a des honneurs intelligents, on peut tabler 4♠ même s’il est dans la zone 11-12… et s’arrêter à 2♠ s’il a trop de points à Trèfle et à Cœur.
Même genre de problème avec la 1 : si le fit est acté, il faut se contenter de 2♠ avec ce triste assortiment de 13 points qui en valent bien au moins 12. Sinon, on peut être tenté par l’enchère de 2SA.
Et avec la 4 ? Un 4♠ évident si Nord a toujours 3 atouts, mais sinon ? 2♠ ? 3♠ ? Rien ne colle.

Je vous propose donc de convenir que ce cue-bid promet le fit à 100 %. Sachant que 1SA couvre la zone 9-12 (8 beaux, 12 moches) avec ou sans arrêt dans la mineure adverse, que 2SA couvre la zone 13-14 (12 beaux) avec un arrêt dans la couleur adverse, le changement de couleur dans “l’autre mineure” (ici, 2) peut alors se faire parfois (rarement) dans 4 cartes seulement quand on ne peut pas dire 2SA faute d’arrêt (ou quand on a 4 cartes à Cœur et qu’on ne veut pas rater un fit 4-4 en face d’une intervention faible). Vraiment pas bien grave puisqu’on est dans la même situation qu’en réponse à une ouverture.

ONES
1♠
-2♣22♠

main n° 1

Sud
  • AD854
  • 65
  • RV4
  • A74

main n° 2

Sud
  • V75432
  • 63
  • ADV
  • A2

main n° 3

Sud
  • AV9874
  • 8
  • AD87
  • V2

main n° 4

Sud
  • RD109874
  • 4
  • AV4
  • D4

Si Est avait passé, on aurait dit 2♠ avec la 1, la 2 et la 4 (trop faible en points H pour 3♠), sans que cette répétition “poubelle” ne promette 6 cartes. Avec la 3, on aurait dit 2 (6-4 = bicolore).
Quand l’adversaire intervient, il nous “libère” de parole puisqu’on peut maintenant passer sans risquer d’empêcher Nord de pouvoir s’exprimer à nouveau. La répétition “libre” à 2♠ va donc maintenant impérativement promettre 6 cartes : pas de problème pour la 4, ni même la 2 : les Piques sont moches, mais nombreux et il faut le dire au partenaire. On va dire aussi 2♠ avec la 3 puisqu’on nous a “volé” l’enchère de 2 et qu’il peut y avoir urgence à montrer le 6e Pique. Bien entendu, il faut passer avec la 1.

ONES
1♠
2♣2-2♠

main n° 1

Sud
  • RV875
  • D42
  • 54
  • AD2

main n° 2

Sud
  • AV8754
  • A2
  • RD54
  • 6

main n° 3

Sud
  • RD963
  • AR4
  • R42
  • 74

main n° 4

Sud
  • D8754
  • AD2
  • 3
  • AR96

Cette fois, l’intervention s’est faite avant l’enchère de 2 et Est a passé. On ne peut donc plus parler de répétition “libre” et 2♠ redevient une enchère poubelle. Par ailleurs, même si vous avez adopté les 2/1 FM dans le silence adverse, il faut revenir au 2/1 auto-forcing après intervention (sans exception pour moi, mais avec l’exception du soutien simple de la couleur de réponse pour bon nombre de mes collègues – et le SEF). La redemande à 2SA redevient 15-17, distribution régulière avec un arrêt dans la couleur adverse et on va donc être contraint de dire 2♠ avec la 1 (trop faible pour 2SA), la 3 (pas d’arrêt Trèfle) et la 4 (irrégulière). En revanche, avec la 2, la seule à comporter 6 cartes à Pique ( 🙂 ), je continue personnellement à dire 3 puisque je joue l’enchère forcing. A défaut, vous devez dire 2♠ (qui ne promet pas 6 cartes et masque le fit à Carreau) ou utiliser un cue-bid fourre-tout et bien peu économique, qui ne promet ni le 6e Pique ni le fit à Carreau : l’assurance de ne pas parvenir à bon port !

ONES
1X-1
-2-2

main n° 1

Sud
  • 874
  • 632
  • 8754
  • D74

main n° 2

Sud
  • R54
  • V9542
  • 84
  • DV7

main n° 3

Sud
  • RD74
  • V1087
  • 874
  • 63

main n° 4

Sud
  • R54
  • DV10942
  • 874
  • 6

Rappelons tout d’abord la signification des enchères précédentes :
1 : meilleur ou moins mauvais choix, 0-7 H.
2 : soit un fit 4e à Cœur et au moins 20 DH, soit une bombe d’au moins 22 H (suivez ce lien).

Eliminons d’abord la 3, avec laquelle il faut répondre 1♠ et pas 1 (nous en avons souvent parlé sur ce site).

Sur le cue-bid à 2, le répondant doit essayer de “donner le plein de sa main”, expression que l’on entend souvent mais qui reste assez nébuleuse pour beaucoup de gens et qui signifie qu’il doit essayer de se décrire du mieux possible : distribution et force. Dans ce genre de cas, la “frontière” est la répétition de sa couleur. Si on la dépasse, on est maximum (4/5-7 H, en l’occurrence). Si on répète sa couleur, on est minimum (sans pour autant la rallonger) et, en-dessous, la force reste inconnue. C’est exactement le même principe que pour 1 2♣ dans le silence adverse : 2 minimum, 2♠ et plus non minimum et 2 ambigu.

2 n’est donc pas ici une répétition destinée à allonger les Cœurs, mais à marquer la faiblesse de la main (0-3/4 H)… notre main n° 1 !!!
Avec la 2, il faut dire 3 (maximum avec 5 cartes) et, avec la 4, il faut carrément bondir à 4 pour montrer la couleur sixième autonome. A noter qu’un cue-bid de Sud à 3 décrirait une main maximum, mais sans 5 Cœurs, sans deuxième couleur ni arrêt à Carreau.

ONES
1-1
-3-3

main n° 1

Sud
  • 87
  • RD52
  • 632
  • AV87

main n° 2

Sud
  • AV97
  • RV742
  • 82
  • R4

main n° 3

Sud
  • AV9
  • RD542
  • 87
  • 963

main n° 4

Sud
  • A74
  • RV108742
  • 4
  • 63

Il faudrait supprimer les cartons 3 des boites à enchères ! A chaque fois qu’un joueur s’en sert, il plonge son partenaire dans d’atroces souffrances !
Rappelons quand même que, sur ce début qui dévoile de beaux et longs Carreaux chez l’ouvreur, l’objectif à atteindre sera bien plus souvent 3SA (basé sur l’exploitation des Carreaux) qu’une manche majeure, même s’il existe un fit à Cœur ou à Pique.
Avec la main 3, mieux vaut déclarer 3♠ que répéter les Cœurs pour inciter l’ouvreur à dire 3SA s’il tient les Trèfles. A défaut, il pourra soutenir à 4 dans 3 cartes, au cas où on en ait 5.
Avec la 2, le mieux est de dire 3SA soi-même. Même dans le cas rare où l’ouvreur aura 3 cartes à Cœur, 3SA sera souvent au moins aussi bon que 4.
Avec la 4, il faut jumper à 4, le contrat que l’on a envie de jouer, tout simplement. Dire 3 puis insister à 4 sur un éventuel 3SA en face pourrait laisser croire qu’on espère le chelem, d’après le principe de la vitesse d’atteinte (plus on va lentement pour aller quelque part, plus on pense à aller plus loin).

Notre gagnante est donc la 1 !! Si on entend 3SA, parfait. Sinon, on conclura à 5 au tour suivant.

Professeur agréé par la F.F.B, Marc Kerlero enseigne le bridge depuis 1980. Il est l'auteur de 15 ouvrages, dont plusieurs best-sellers et a été rédacteur en chef d'Objectif 13 puis de Bridgerama. Il a collaboré aussi à Jouer Bridge. Il a été champion d'Europe junior en 1984, vice-champion de France de division nationale I en 2004, champion de France de division nationale II par quatre en 2014 et vainqueur de la Coupe de France en 2019.